Contexte Mecquois
Contexte de la Mecque
La Mecque était la plus grande cité d'Arabie : elle en était la capitale religieuse et économique, devant d'autres cités comme San'a au Yémen ou des centres du nord soumis à la domination perse ou byzantine.
Sur le plan moral, cependant, la vie à La Mecque laissait beaucoup à désirer. L'affluence dont jouissaient les Mecquois les incitait à s'adonner à toutes sortes de vices. Le jeu, la boisson, et toutes sortes de divertissements organisés où régnait la débauche la plus outrancière, étaient monnaie courante. Avec cela, les Mecquois n'étaient guère scrupuleux dans leurs relations avec les autres : la cruauté, l'injustice et la spoliation d'autrui par la force restaient impunies. Il en résultait inévitablement des tensions, qui ne pouvaient que saper les fondements de la société mecquoise.
Grâce à la richesse dont jouissaient les Mecquois et au fait que cette richesse provenait essentiellement du commerce extérieur, ils disposaient de beaucoup de temps libre. Comme nous l'avons dit précédemment, rares étaient les Mecquois qui pratiquaient un autre métier que le commerce, qui consistait principalement à organiser des caravanes commerciales et des missions avec lesquelles partaient seulement ceux qui possédaient une expérience solide de ce type de commerce, ainsi que le nombre nécessaire d'assistants, de porteurs et de chameliers. La plus grande caravane que les Mecquois aient envoyée fut peut-être celle que les musulmans de Médine tentèrent d'intercepter peu après que le Prophète s'y fut installé, une tentative qui donna lieu à la bataille de Badr où les musulmans obtinrent une grande victoire.
Cette caravane était composée d'un millier de chargements de chameaux, accompagnés par seulement trois cents personnes. Un grand nombre de notables de La Mecque partaient avec ces caravanes lorsqu'ils étaient encore très jeunes, parce que ces voyages leur apportaient une grande expérience. Lorsqu'ils en avaient assez, ils confiaient la tâche à leurs enfants ou à ceux de leurs assistants qui s'étaient distingués dans le commerce. Nous avons un exemple de ces hommes compétents qui représentaient les notables de La Mecque dans les expéditions commerciales en la personne de Suhayb, qui voyageait pour le compte de Abdullâh ibn Jud'an, l'un des hommes les plus riches de La Mecque. Suhayb, un ancien esclave, acquit une fortune considérable en recevant des commissions, puis commença ensuite à investir son propre capital.
La vie étant si facile à La Mecque, il était inévitable que les vices sociaux se répandent et deviennent monnaie courante. On passait beaucoup de temps à rechercher le plaisir sous ses différentes formes. Les idées religieuses et les valeurs morales étaient au plus bas. Bien avant la naissance du Prophète , les Arabes avaient commencé à dévier de la foi pure d'Abraham et Ismaël. Avec le temps, leurs croyances religieuses finirent par ne présenter qu'une très vague ressemblance avec la foi prêchée par les prophètes.
Les Arabes avaient imité les pratiques idolâtres d'autres nations et oublié leur foi monothéiste, enseignée par Abraham et Ismaël. Les idoles étaient omniprésentes, dans toutes les tribus. Certaines idoles étaient vénérées par tous les Arabes, tandis que d'autres étaient considérées comme les divinités particulières de tribus précises. Certaines familles avaient leurs propres idoles, et lorsque les gens partaient en voyage, ils emmenaient parfois leur idole avec eux pour leur procurer des bienfaits.
Les Arabes adoraient ces idoles, qui n'étaient pourtant que des objets inanimés : ils leur offraient des sacrifices, les consultaient au sujet de leurs affaires et leur attribuaient une part de leur bétail et du produit de leurs terres. Ils affectaient certaines idoles à certaines tâches : les unes avaient pour spécialité d'amener la pluie ou de faire souffler le vent, les autres de donner une progéniture aux parents, de guérir les maladies ou encore d'épargner à la communauté des maux comme la famine, etc. Afin de surmonter le fait évident que ces idoles n'étaient rien de plus que des objets qu'ils fabriquaient eux mêmes, les Arabes leur attribuaient une position intermédiaire entre eux-mêmes et Dieu.
Les idoles servaient d'intercesseurs, intervenant pour eux auprès de Dieu pour qu'il ne les punisse pas trop sévèrement de leurs péchés. Il y avait trois cent soixante idoles dans la Ka'ba et autour. Les principales étaient Hubal, al-Lât et al-'Uzzâ, qui étaient considérées comme les chefs de toutes les idoles arabes. Hubal était une statue de cornaline rouge, de forme humaine. Lorsque les Quraysh prirent le contrôle de La Mecque, ils trouvèrent Hubal avec un bras cassé : ils le remplacèrent par un bras en or. C'était l'idole suprême. Al-Lât se trouvait à Tâ'if, tandis que al-'Uzzâ avait sa propre place près de Arafat.
Quand ils s'apprêtaient à se lancer dans une entreprise importante, les Arabes se rendaient à la Ka'ba et donnaient à un homme chargé des tirages au sort une somme d'argent et un chameau pour qu'il tire au sort avec l'aide de Hubal. Ils acceptaient la décision sans discussion. De même, si un crime était commis et qu'ils ne pouvaient en déterminer l'auteur, ils tiraient au sort. Si le résultat accusait quelqu'un, il était considéré comme le criminel et n'avait aucune possibilité de prouver son innocence.